jeudi 10 février 2011

Articles


Michel-Ange, architecte à Constantinople

Mathias Enard (Zone, Actes Sud 2008, Prix Décembre et Prix du ­Livre Inter) a décidément la cote. Son nouveau roman, Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants a ­obtenu mardi le Prix Goncourt des lycéens. Certes, il est bien écrit. Certes, le fait historique tiré de l’oubli vaut le détour (le séjour de Michel-Ange à Constantinople en 1506 à l’invitation du sultan Bajazet pour construire un pont sur la Corne d’Or) et certes l’ensemble est ciselé comme une belle pièce de joaillerie. Mais on reste malgré tout sur sa faim. Comme si l’auteur s’était laissé enfermé dans ses propres stratagèmes.
Michel-Ange donc. Le livre s’ouvre sur une apostrophe mystérieuse et envoûtante, d’emblée. Une femme ou un homme, on ne sait pas encore, s’adresse à un homme (on devine Michel-Ange): il y est question de passion, de taverne, de gloire et d’impossible consolation. Car le voyage,véridique, du peintre de la Renaissance italienne à la cour ottomane sera un échec. Et étrangement, dans la relation même de ce séjour, largement imaginé quoique appuyé sur des sources exposées à la fin, l’auteur perd le souffle initial. Et l’on ne se sent pas vraiment concerné par ces tribulations ottomanes.

http://www.curiosphere.tv/video-documentaire/0-toutes-les-videos/109582-reportage-mathias-enard-michel-ange-a-constantinople

Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants de Mathias Enard – Le génie et la beauté
13 mai 1506. Laissant derrière lui Jules II, pape guerrier, orgueilleux et mauvais payeur, ainsi que l’œuvre qu’il a entamé pour ce dernier à Rome, Michelangelo Buonarroti débarque à Constantinople invité par Bayezid le Juste1. Le sultan propose au sculpteur de génie une somme faramineuse pour qu’il lui dessine un pont reliant les deux rives du Bosphore. Monumental et enrichissant projet que Michel-Ange accepte afin de fuir l’Italie et ses tracas, mais aussi par défit : avant lui, le dessin de Léonard De Vinci a été refusé par le sultan…
Au-delà du plaisir que le lecteur, amateur d’art ou non, peut ressentir à la découverte des aventures stambouliotes de Michel-Ange, Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants interpelle le mythe, l’imaginaire et le fantasme orientaliste à la manière du Salammbô de Flaubert. Le voyage, les riches et équilibrées descriptions, le caravansérail, les danses androgynes, tout concourt au ravissement des sens. Et le trouble que ressent Michel-Ange face à ces beautés, proche, par procuration, de celui qui gagne le lecteur, semble être le miroir du plaisir que fut l’écriture de ce texte par son auteur. En cela, le roman de Mathias Enard est déjà une réussite.
Mais, outre les indications apportées, ou en tout cas suggérées, en matière d’Histoire de l’art (telle exécution qui influença Michel-Ange pour sa scène de David et Goliath ; telle ornementation que l’on retrouvera « dans un recoin de la chapelle Sixtine quelques années plus tard »), Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants est un livre aux multiples lectures, un roman à plusieurs visages. Le lecteur est dans un premier tant frappé par le jeu des oppositions qui s’y développe. Des oppositions qui tiraillent le personnage de Michel-Ange dans ses choix : pape/sultan ; chrétien/musulman ; guerre/poésie ; orient/occident ; homosexualité/hétérosexualité… De fait, l’édification de ce pont apparaît dans le récit comme la métaphorique solution pouvant atténuer les frictions qui hantent le sculpteur, tandis qu’elle semble être chez l’auteur un utopique désir de lier deux mondes antinomiques.

Parmi ce que nous appelons, faute de mieux, ces oppositions, l’une d’entre elles va prendre le dessus dans le roman, non pas en terme de complexité, mais parce qu’elle offre les plus belles pages du livre, le cœur même du récit. Il s’agit de l’amitié aux résonances homosexuelles entre Michel-Ange et le poète de la cour, Mesihi, qui lui tient compagnie et lui sert de guide. La beauté des liens qui vont se tisser entre les deux hommes est abordée par Enard de façon magistrale, esquissant des possibilités, évoquant la naissance du désir sans charger le texte. L’auteur brouille d’ailleurs les pistes jusqu’à ce que le discours de la belle danseuse qui se retrouve dans le lit du sculpteur puisse être celui que le poète Mesihi tiendrait si seulement… Et pourtant, cette fameuse danseuse qui fascina Michel-Ange le sobre, un soir où celui-ci accompagna Mesihi le buveur dans les tavernes, cette danseuse qui rend jaloux le poète n’ignore pas ce que le sculpteur ne voit pas : « Ce n’est pas moi que tu désires. Je ne suis que le reflet de ton ami poète, celui qui se sacrifie pour ton bonheur. » Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants débute par un extrait emprunté au livre de Rudyard Kipling, Au hasard de la vie : « Puisque ce sont des enfants, parle-leur de batailles et de rois, de chevaux, de diables, d’éléphants et d’anges, mais n’omets pas de leur parler d’amour et de choses semblables. » Et Enard a bien suivi ce qui peut apparaître comme une méthode pour raconter une histoire, faire un roman. D’ailleurs, en son sein, Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants est également une réflexion sur l’art de conter. Les nombreux et très beaux chapitres qui s’intercalent dans le récit pour faire entendre la danseuse, telle Shéhérazade, narrer à un Michel-Ange prostré contre son corps, silencieux, « fermé comme un coquillage », des contes et des légendes des princes de l’Orient, sont autant de conseils donnés à l’écrivain afin qu’il réussisse à raconter son histoire de sultan, de guerre, d’amour et de voyage. Ce que Mathias Enard réalise brillamment.

http://rhinoceros.eu/2010/08/parle-leur-de-batailles-de-rois-et-d-elephants-de-mathias-enard/

Quelques liens

Vidéo de Mathias Enard se justifiant sur le choix de son titre
http://www.curiosphere.tv/video-documentaire/0-toutes-les-videos/109582-reportage-mathias-enard-michel-ange-a-constantinople

Milles et Une Nuits
http://www.shanaweb.net/contes-orientaux/1001-nuits/1001-et-nuits.html

Vizir Ali Pacha
http://encyclo.voila.fr/wiki/Bayezid_II

La poésie persane
http://fr.wikipedia.org/wiki/Litt%C3%A9rature_persane#Po.C3.A9sie

mercredi 9 février 2011

critique de Julie Étienne, du Monde.
Elle juge que le roman est " solennel et gracile à la fois [...] même s'il lui arrive de frôler la préciosité, n'évitant pas toujours un lyrisme et un symbolisme un peu empesés. Il est spécialement convaincant dans l'amour du langage et la foi dans le récit qui circulent entre les protagonistes »

D'autres sur sites CritiquesLibres.com pense que L'Histoire dans l'histoire de Michel-Ange est fabuleuse, on se régale de ces courts chapitres, écrits dans une langue choisie. Michel Ange apparait parfois perdu comme devant la ville, face à la langue ou encore face aux habitudes des habitants. Il apparaît parfois plein de de finesse et d'arrogance comme ses rapports avec le papes Jules II, ou encore parfois génial et fulgurant dans son art et amoureux de sa danseuse dont il ne connaît le nom.
Un Michel Ange humain, avec une base historique et "pour le reste, on ne sait rien" quelle chance : un régal !




lundi 7 février 2011

Article, de la part de Vinoth

Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants est le nouveau roman de Mathias Enard, bombe de la rentrée littéraire.

Je les entends déjà rire, et pourtant je ne parlerai que peu de Zone. Paru en août 2008, prix Décembre, prix du Livre Inter, Zone est son précédent roman qui avait été pour moi la sortie de l’année.

Je ne dirai pas que j’ai été déçu par son nouveau roman, mais il est juste de dire qu’il est très différent. Michel-Ange arrive à Constantinople en 1507 pour lancer le chantier d’un gigantesque pont qui reliera les deux rives de la Corne d’Or. Le grand Léonard vient d’y échouer et pour prendre sa place, et surtout par appât du gain, celui qui n’est pas encore le célèbre créateur du plafond de la Chapelle Sixtine, arrive dans cette ville aux portes de l’Orient. Plus qu’un architecte ou qu’un sculpteur, l’homme découvre les joies et les tourments du dilettantisme dans cette cité d’impies qui ne s’appelle plus Constantinople. De retour de longues balades avec ses accompagnateurs mandatés auprès de lui par le Grand Vizir, Michel-Ange s’enferme dans sa chambre pendant des jours et s’abandonne dans des esquisses de détails entrevus dehors. C’est une danseuse venue égayer une soirée à laquelle il participe, qui lui fait découvrir l’amour. Mais s’il n’est pas même parvenu à déceler le sexe de ce corps, Michel-Ange hésite devant la nature des désirs que cet être crée chez lui. Ce n’est pas cet amour qui éveille l’artiste, mais un autre, plus proche et pourtant plus loin de lui, et que la danseuse devenue amante (ou le danseur devenu amant) va lui permettre de découvrir. Nous savons, quand nous connaissons la biographie de cet artiste qui a marqué des générations d’artistes après lui, qu’il a été amoureux d’un homme. Nous découvrons dans ce court texte de Mathias Enard que cet homme, il l’avait connu à Istanbul.

Un roman qui commence léger et termine ténébreux, et qui en ça ressemblerait à son grand frère Zone, mais il n’en est rien. Son écriture est plus simple, moins maniérée même, diront ceux qui avaient détesté Zone, et j’en connais personnellement. On y retrouve bien sûr au moins l’un des sujets de prédilection de l’auteur. Il mentionnait déjà dans Zone cette région géographique qu’est la Méditerranée, et encore plus, les rives orientales de cette mer. Souvenons nous de cet ex-agent secret ressassant à l’occasion d’un ultime voyage en train tous les souvenirs de quinze années de renseignements autour de la Méditerranée. Pour ceux qui l’avaient lu, souvenons nous de La perfection du tir, premier excellent roman de l’auteur et qui mettait en scène un jeune sniper lors d’une guerre civile non citée à aucun moment hors le fait qu’elle se situait dans une région méditerranéenne dans laquelle nous reconnaissions le Liban. Ce garçon encore adolescent est entré dans la guerre et parce qu’il ne connait rien d’autre ne saura jamais comment vivre l’amour qu’il éprouve pour une jeune femme, autrement que dans la violence et les larmes. Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants est pour moi un roman qui aurait pu faire partie de Zone. Il le complète et y ajoute une pincée d’art et de sentiments. À ce même titre, La perfection du tir annonçait Zone en cela que ce pouvait être une histoire rencontrée par l’agent secret.

Michel-Ange peste contre Jules II le pape guerrier et autoritaire qui l’a si mal traité. Michel-Ange est orgueilleux. Michel-Ange a conscience d’être un artiste de valeur. »

« Michel-Ange frémit dans son manteau de laine, le printemps est timide, pluvieux. Michelangelo Buonarroti atteint les frontières de la République de Florence à la seconde heure de la nuit, nous apprend Ascanio Condivi, son biographe ; il s’arrête dans une auberge à trente lieues de la ville.

Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants reste un beau roman à lire. Vous y découvrirez un court moment de la longue vie de Michel-Ange et qui pourtant la déterminera jusqu’à sa fin. L’écriture, au delà d’être différente, est très intéressante, et plus travaillée à mon goût que les ouvrages précédant Zone. L’auteur use d’un système de narration cher aux américains et à certains français auxquels Mathias Enard se plait à ressembler. Il n’entre pas dans la psychologie de son personnage ni d’aucun autre. Il décrit les faits, simplement, et au lecteur d’en tirer ses conclusions. Un petit extrait pour en illustrer le propos, tiré du début du roman :

Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants est le nouveau roman de Mathias Enard, bombe de la rentrée littéraire.

Je les entends déjà rire, et pourtant je ne parlerai que peu de Zone. Paru en août 2008, prix Décembre, prix du Livre Inter, Zone est son précédent roman qui avait été pour moi la sortie de l’année.

Je ne dirai pas que j’ai été déçu par son nouveau roman, mais il est juste de dire qu’il est très différent. Michel-Ange arrive à Constantinople en 1507 pour lancer le chantier d’un gigantesque pont qui reliera les deux rives de la Corne d’Or. Le grand Léonard vient d’y échouer et pour prendre sa place, et surtout par appât du gain, celui qui n’est pas encore le célèbre créateur du plafond de la Chapelle Sixtine, arrive dans cette ville aux portes de l’Orient. Plus qu’un architecte ou qu’un sculpteur, l’homme découvre les joies et les tourments du dilettantisme dans cette cité d’impies qui ne s’appelle plus Constantinople. De retour de longues balades avec ses accompagnateurs mandatés auprès de lui par le Grand Vizir, Michel-Ange s’enferme dans sa chambre pendant des jours et s’abandonne dans des esquisses de détails entrevus dehors. C’est une danseuse venue égayer une soirée à laquelle il participe, qui lui fait découvrir l’amour. Mais s’il n’est pas même parvenu à déceler le sexe de ce corps, Michel-Ange hésite devant la nature des désirs que cet être crée chez lui. Ce n’est pas cet amour qui éveille l’artiste, mais un autre, plus proche et pourtant plus loin de lui, et que la danseuse devenue amante (ou le danseur devenu amant) va lui permettre de découvrir. Nous savons, quand nous connaissons la biographie de cet artiste qui a marqué des générations d’artistes après lui, qu’il a été amoureux d’un homme. Nous découvrons dans ce court texte de Mathias Enard que cet homme, il l’avait connu à Istanbul.

Un roman qui commence léger et termine ténébreux, et qui en ça ressemblerait à son grand frère Zone, mais il n’en est rien. Son écriture est plus simple, moins maniérée même, diront ceux qui avaient détesté Zone, et j’en connais personnellement. On y retrouve bien sûr au moins l’un des sujets de prédilection de l’auteur. Il mentionnait déjà dans Zone cette région géographique qu’est la Méditerranée, et encore plus, les rives orientales de cette mer. Souvenons nous de cet ex-agent secret ressassant à l’occasion d’un ultime voyage en train tous les souvenirs de quinze années de renseignements autour de la Méditerranée. Pour ceux qui l’avaient lu, souvenons nous de La perfection du tir, premier excellent roman de l’auteur et qui mettait en scène un jeune sniper lors d’une guerre civile non citée à aucun moment hors le fait qu’elle se situait dans une région méditerranéenne dans laquelle nous reconnaissions le Liban. Ce garçon encore adolescent est entré dans la guerre et parce qu’il ne connait rien d’autre ne saura jamais comment vivre l’amour qu’il éprouve pour une jeune femme, autrement que dans la violence et les larmes. Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants est pour moi un roman qui aurait pu faire partie de Zone. Il le complète et y ajoute une pincée d’art et de sentiments. À ce même titre, La perfection du tir annonçait Zone en cela que ce pouvait être une histoire rencontrée par l’agent secret.

Michel-Ange peste contre Jules II le pape guerrier et autoritaire qui l’a si mal traité. Michel-Ange est orgueilleux. Michel-Ange a conscience d’être un artiste de valeur. »

Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants reste un beau roman à lire. Vous y découvrirez un court moment de la longue vie de Michel-Ange et qui pourtant la déterminera jusqu’à sa fin. L’écriture, au delà d’être différente, est très intéressante, et plus travaillée à mon goût que les ouvrages précédant Zone. L’auteur use d’un système de narration cher aux américains et à certains français auxquels Mathias Enard se plait à ressembler. Il n’entre pas dans la psychologie de son personnage ni d’aucun autre. Il décrit les faits, simplement, et au lecteur d’en tirer ses conclusions. Un petit extrait pour en illustrer le propos, tiré du début du roman :

« Michel-Ange frémit dans son manteau de laine, le printemps est timide, pluvieux. Michelangelo Buonarroti atteint les frontières de la République de Florence à la seconde heure de la nuit, nous apprend Ascanio Condivi, son biographe ; il s’arrête dans une auberge à trente lieues de la ville.

http://img96.imageshack.us/img96/7550/istanbul02og9.jpg
Cette photo nous montre le grand pont de d'Istanbul moderne . Il représente la version moderne du pont que devait construire Michel-Ange dans Parle leurs de batailles,de rois et d'éléphants. Je l'ai choisit car elle représente le projet du Pacha d'Istanbul mais de nos jours .

Parlez leur de batailles de rois et d'éléphants de Mathias Enard n'est pas un roman comme les autres.
Considéré comme un roman historique, Parlez leur de batailles de rois et d'éléphants dépeint ici la vie et les pensées de Michel-Ange durant 3 mois passés à Istanbul mêlant genre lyrique, poétique, historique et encore épistolaire.

De la poésie...

Tu n'as pas su t'élever à la hauteur de l'amour
Et prendre tel le faucon ce qui était à ta portée
La proie était à toi, tu l'as laissée passer
Les amants sont cruels s'il voient faiblir l'aimé.
Cette bataille que j'ai gagnée, je la perds.
Ce sol que je défends sera pour moi un désert,
Et les âmes de ceux que j'ai assassinés,
Mes gardiens pour l'éternité.
(p.98)

Un roman épistolaire...

Buonarroto, je n'ai pas le temps de répondre à ta lettre, ça c'est la nuit ; et quand bien même je l'aurais, je ne pourrais pas te donner une réponse ferme, puisque je ne vois pas la fin de mes affaires ici. Je serai près de vous bientôt et ferai alors tout le possible pour vous, comme je l'ai accompli jusqu'à présent. Moi-même je me sens plus mal que jamais, blessé et pris d'une grande fatigue ; pourtant j'ai la patience de m'efforcer pour atteindre le but projeté. Vous pouvez donc bien patienter un peu, puisque vous êtes dix mille fois en meilleur état que moi.
Ton Michelagnolo (p.138)

Le roman est en partie épistolaire, de nombreuses lettres de Michel-Ange écrites à ses frères, restés en Italie, y sont présentes. Celui-ci y décrit ses inquiétudes vis à vis de son statut à venir par rapport au Pape Jules II, ainsi que des considérations matérielles concernant des questions financières et la fabrication d'une dague pour un de ses frères.

Drame intime...


Ce roman met en évidence les pensées intimes et initialement ambivalentes de Michel Ange vis à vis du jeune Mesihi et surtout sa fascination de la danseuse. Il décrit avec détails les rapports de l'étranger Florentin qu'il est, venu dans la cour du grand Turc fabriquer un pont qui traverserait la Corne d'or, au centre d'Istanbul. La distanciation de Michel Ange vis à vis de ces situations vécues dans Istanbul dont ils semblent peu inquiets sont à opposer aux craintes qu'il entrevoit dans ces rapports futurs avec le Pape Jules II. La fin tragique du roman au cours duquel Mesihi par jalousie sacrifie la chanteuse Andalouse vient clôturer le séjour de Michel Ange en Turquie de manière brutale. La déchéance de Mesihi dans l'alcool, l'opium et le sexe, reflète la tristesse et le désespoir du jeune traducteur Turc après le départ de Michel Ange.
Cette manière de procéder montre également que c'est au lecteur de déterminer la façon dont il entrevoit ce livre : journal de bord, journal intime ou carnet de note de l'artiste Florentin en Turquie ou réflexion sur les pensées intimes du jeune Mesihi face au génie Italien, admiration puis jalousie dramatique
.

Un roman historique...

Michelangelo, peintre et sculpteur de renom débarque à Istanbul sur la demande du Sultan Bajazet en 1509. Le souverain lui a passé commande d'un pont à ériger au-dessus de la Corne d'or. Il s'agit de créer une jonction entre l'Orient et l'Occident. Le génie de la sculpture (David, La Pietà) est parti sur un coup de tête. Il en avait assez des rebuffades du pape Jules II. Il a laissé en plan la construction du tombeau du pape alors trop mauvais payeur pour s'engager sur le projet Turque.

Ce résumé rappelle que Parlez leur de bataille de rois et d'éléphant peut être aussi perçu comme un roman historique expliquant l'histoire du pont entre l'Orient et l'Occident.
Ce roman regorge de nombreuses anecdotes sur la vie dans la cour d'Ali Pacha, les bas-fonds d'Istanbul, le quotidien de l'artiste Florentin et sa manière de travailler ainsi que les rapport de ce dernier avec la papauté d'alors.


Louise O.

Parle leur de batailles, de rois et d'éléphants est un livre poétique, avec un bon rythme, et une histoire bien ficelée, qui fascine. Ce livre m'a beaucoup plu.


Si cet ouvrage était un tableau, ce serait "Vue de Constantinople au clair de lune" , par Ivan Konstantinovitch Aïvazovski. Le coucher de soleil est d'une certaine façon très poétique, et reflète assez bien l'esprit du livre, notamment les passages où l'andalouse parle.

Si ce livre était une couleur ce serait le rouge, qui représente la chaleur (ici du pays) mais aussi les sentiments qui le relie à l'andalouse.

Si parle leur de batailles, de rois et d'éléphants était un objet ce serait un fusain, avec lequel Michel-Ange dessine invente et imagine, pour au final parvenir à créer le pont plus parfait possible.

Le paysage qui correspondrait le plus à ce livre serait celui d'un soleil se couchant.
Parle leur de batailles,de roi et d'éléphants n'est pas un roman ordinaire car il mélange la fiction et l'histoire. En effet, il part à la base d'un personnage historique mais cette histoire ne lui est jamais arrivée. L'auteur mélange aussi la poésie à la narration ce qui en fait un ouvrage plutôt particulier mais plaisant à lire !
Voici quelques liens où Mathias Enard explique pourquoi il à écrit ce livre, et ses choix...

http://www.youtube.com/watch?v=6a_VmSxHDHE

http://www.youtube.com/watch?v=eny09J8-J0Y

Rencontre de Mathias Enard - Lauréat du Goncourt des lycéens 2010 :

http://www.youtube.com/watch?v=S7ASkS0xasI (Partie 1)
http://www.youtube.com/watch?v=2h5pf5tOu3c (Partie 2)

Louise O.
Parle-leur de batailles... n'est pas un roman comme les autres de part son écriture poétique. D'autre part, le genre du livre n'est pas défini clairement ; il oscille entre biographie, récit, roman épistolaire et poésie.
Mathias Enard nous plonge dans un voyage dans la capitale ottomane, dans un monde coupé entre l'occident et orient. Il y dépeint une histoire à la frontière entre le réel et l'imaginaire.





si Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants serait un tableau se serait un pont.

Ce pont est beau et a été peint par Michel Rigel.








Si Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants serait une couleur se serait à la fois le noir du complot et de la trahison et le rouge de l'amour intime.


réponse à la question 1

Ce n'est pas un roman comme les autres, car il y a plusieurs genres littéraires comme le registre poétique, narratif et descriptif. Ce roman est aussi une petite biographie de la vie de Michel-Ange lors de son passage à Constantinople.

Ce roman diffère des autres.

"Parle leur de batailles, de rois et d'éléphants" n'est pas un roman comme les autres car dans les autres romans l'auteur se base sur des faits réels mais l'histoire ne se passe jamais à travers les pensées d'un personnage.
ici, le narrateur Michel-Ange raconte l'histoire en donnant son point de vue.
Par ailleurs, ce roman se distingue des autres par son aspect poétique.

J'ai choisi ce tableau car on voit une femme qui me fait penser à la femme andalouse. Michel-Ange parvient à avoir l'idée du pont grâçe à cette femme, elle l'inspire et donc elle a joué un rôle essentiel dans la construction de ce point et dans la vie de Michel-Ange.
On peut aussi voir le coucher de soleil, qui me fait penser à la beauté de Constantinople que décrit Michel-Ange lors du coucher de soleil.

dimanche 6 février 2011

Voici un extrait de la critique de "chroniques de la rentrée littéraire":

"...C’est aussi le portrait d’un homme dans toutes ses contradictions qui est dressé ici : sa rivalité avec son aîné Léonard de Vinci, son orgueil et son ambition ne sont pas ignorées… Tout comme ses problèmes d’argent : on croirait lire des lettres d’écrivains réclamant des à-valoir à leur éditeur !
Et si le pont sera construit, mais soumis aux caprices de la Nature, Michel Ange trouvera sur place une source d’inspiration qui nourrira la suite de son oeuvre, à commencer par le Vatican..
Le récit alterne le travail créatif, la façon dont Michel Ange s’est peu à peu imprégné de l’ambiance de Constantinople et une sorte de monologue tenue par un ou une stambouliote, une jolie variation sur les 1001 nuits.
Quand à l’écriture, elle est classique et élégante, d’une grave poésie. Deux exemples vaudront mieux qu’un long discours : « Et, plus que tout, le dessin, la blessure noire de l’encre, cette carresse crissant sur le grain du papier ». « La vérité c’est qu’il n’y a rien d’autre que la souffrance et que nous essayons d’oublier dans des bras étrangers que nous disparaitrons bientôt »..."




Si Parle leur de batailles, de rois et d'éléphants était...
  • ...un tableau, ce serait Le Pont de Brooklyn de Théodore Butler. Dans le cas de New York comme dans le cas de Constantinople, il ne s'agit pas seulement de simples ponts mais de ce qui relient les gens entre eux, tout comme cette histoire à relié Michel-Ange et la danseuse andalouse.

  • ...des mélodie ce serait "The Flying Dutch man" de Wagner pour le côté grandiose et magnifique de Constantinople. La "Nocturne II" de Chopin représente le côté poétique et l'histoire de la danseuse andalouse.

  • ...une poésie ce serait "Le Grand Homme" de Jacques Prévert:

Chez un tailleur de pierre

où je l'ai rencontré

il faisait prend ses mesures

pour la postérité.

Dans ce poème, Michel-Ange ne serait pas le tailleur de pierre mais le grand homme à la recherche de la gloire éternelle.


Ce texte me fait penser à la création d'Adam, tableau peint par Michel-Ange sur le plafond de la chapelle Sixtine. La main de Dieu qui rejoint celle D'adam est comme le pont que Michel Ange doit construire entre l'Orient et l'Occident

extrait que j'ai préféré

Il a lu et relu la lettre du sultan en espérant qu'un signe du pape mette entre-temps fin à ses incertitudes. Jules II devait être trop occupé avec sa basilique...Après tout, servir le sultan de Constantinople, voilà une belle revanche sur le pontife belliqueux qui l'avait fait jeter dehors comme un indigent. Et la somme offerte par le Grand Turc est faramineuse....qualifié, si le sultan vous a choisi c'est que vous l'êtes, maître,... vous dépasserez (Léonard de Vinci) en gloire si vous acceptez......
Pour le moment, adossé à un bastingage de bois humide, le sculpteur sans égal, futur peintre de génie et immense architecte n'est plus qu'un corps, tordu par la peur et la nausée.


J'ai aimé cet extrait car il met en évidence la diversité des sentiments qui habitent Michel Ange et ses contradictions. D'un côté, il veut aller à Constantinople pour prendre une revanche sur le pape qui le méprise, sur Léonard de Vinci, il se sent flatté d'avoir été choisi et de l'autre côté, il est en proie au tourment et à la peur d'avoir oser défier le pape en répondant ua sultan.
Si Parle- leur de batailles, de rois et d'éléphant était ...





Voici l'extrait du livre qui m'a le plus plut :


"Quatre arches courtes flanquent un arc central à la courbure si douce qu'elle en est presque imperceptible ; elles reposent sur de forts piliers dont les avancées en triangle fendent les eaux comme des bastions. Appuyée sur une forteresse invisible dépassant à peine les flots, une passerelle majestueuse relie deux rives dans la douceur, acceptant leurs différences. Deux doigts graciles qui se touchent."


"Toute son énergie s'y trouve. Cet ouvrage ressemble au David ;on y lit la force, le calme et la possibilité de la tempête .Solennel et gracile à la fois."


J'ai choisit cet extrait car il montre l'aboutissement de tous les rêves et cauchemars de Michel-Ange .On y trouve également le talent et l'imagination nécessaire à un artiste pour être à la fois satisfait et fier de son oeuvre .





*une mélodie ,ce serait une musique orientale sur laquelle l'andalouse aurait put danser ,illuminée par les feux du soir de constantinople .Une musique sous laquelle Michel-Ange serait tombé sous le charme de la danseuse ...





*un tableau, ce serait celui-ci car il représente ,pour moi la fuite de Michel-Ange de
Constantinople à l'aube après la mort de l'andalouse .C'est le petit matin, un nouveau jour ce lève :le temps à Constantinople pour Michel-Ange est terminé .












*une odeur, ce serait l'odeur d'un marché oriental avec ses épices, ses fleurs, ses fruits qui embaument toute la place du marché et qui te poursuit dans les ruelles ombragées .

*un poème ce serait la danseuse orientale de Gibran Khalil:
Par un jour, la cour du prince convia une danseuse,
Accompagnée de tous ses musiciens.
Elle fut présentée à la cour,
Puis elle dansa devant le prince
Aux sons du luth, de la flûte et de la cithare.
Elle dansa la danse des flammes et celle des épées,
Elle dansa la danse des étoiles et celle de l'univers,
Puis elle dansa la danse de la séduction et celle de l'envoûtement.
Et le prince d'être subjugué
Il la pria de s'approcher.
Elle se dirigea vers le trône
Et s'inclina devant lui.

"Belle femme, fille de la grâce et de la joie,d'où vient ton art?
Comment peus-tu maîtriser la terre et l'air dans tes pas,
L'eau et le feu dans ta cadence?"
La danseuse s'inclina de nouveau devant le prince et dit:
"Votre altesse, je ne saurais vous répondre,
Mais je sais que:
L'âme du philosophe veille dans sa tête,
L'âme du poète vole dans son coeur,
L'âme du chanteur vibre dans sa gorge,
Mais l'âme de la danseuse vit dans son corps tout entier .
Si Parlez leur de batailles, de rois et d'éléphants était un objet, il serait un croquis de pont qui représente le travail énorme de Michel Ange.

Un paysage : la basilique Sainte Sophie est le monument qui a le plus impressionné Michel Ange pendant son voyage

http://www.hist-europe.fr/moyenage1/images/toist030.jpg

Un poème : Le pont Mirabeau, d'Apollinaire qui représente à la fois le pont à construire mais aussi la relation de Michel Ange avec Mesihi

Sous le pont Mirabeau coule la Seine
Et nos amours
Faut-il qu'il m'en souvienne
La joie venait toujours après la peine
Vienne la nuit sonne l'heure
Les jours s'en vont je demeure
Les mains dans les mains restons face à face
Tandis que sous
Le pont de nos bras passe
Des éternels regards l'onde si lasse
Vienne la nuit sonne l'heure
Les jours s'en vont je demeure
L'amour s'en va comme cette eau courante
L'amour s'en va
Comme la vie est lente
Et comme l'Espérance est violente
Vienne la nuit sonne l'heure
Les jours s'en vont je demeure
Passent les jours et passent les semaines
Ni temps passé
Ni les amours reviennent
Sous le pont Mirabeau coule la Seine
Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure




Si "
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants" était un tableau, ce serait .. Constantinople, la mosquée de Tophane oeuvre réalisée par Ivan Aïvazovski



Ce tableau représente Constantinople et il fait référence au couverture du livre.

Si "Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants" était une couleur, ce serait... le bleu.
Le bleu symbolise l'Occident.


Si "Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants" était un objet, ce serait un gobelet de cuivre



Si "Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants" était une mélodie, ce serait... Ethnicity - Beautiful Planet Earth qui représenterait le mieux.
http://www.youtube.com/watch?v=3ei1jvDB3fU


Si "Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants" était un poème, ce serait le soleil de l'après-midi écrit par François Sommaripas:

Le soleil de l'après-midi

Je la connais si bien cette chambre...
A présent, comme celle d'à côté, elle est à louer.
Des bureaux. Il n'y a plus dans cet endroit
que courtiers, commerces et entreprises.

Oui, cette chambre m'est bien familière.
A cet endroit, près de la porte, le canapé
à ses pieds un tapis de Turquie;
puis l'étagère avec deux vases jaunes.
A droite - non en face! - une armoire à glace.
Au milieu, la table oú il écrivait;
et les trois fauteuils en rotin.
Près de la fenêtre le lit
oú tant de fois nous nous sommes aimés.

Pauvres meubles,
ils se trouvent certainement quelque part.

A côté de la fenêtre le lit; l'après midi
le soleil venait jusqu'au milieu.

C'était l'après-midi à quatre heures
que l'on s'est quittés, juste pour une semaine...
Cette semaine à duré, hélas, pour toujours.


Si "Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants" était un paysage, ce serait...



Si "Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants" était un plat, ce serait... du couscous.
Le couscous est un plat traditionnel en Occident.
Voici une critique du site le globe-lecteur :

« Dix-sept grandes statues de marbre, des centaines de mètres carrés de fresques, une chapelle, une église, une bibliothèque, le dôme du plus célèbre temple du monde catholique, plusieurs palais, une place à Rome, des fortifications à Florence, trois cent poèmes, sonnets et madrigaux, autant de dessins et d’études, un nom associé à jamais à l’Art, à la Beauté et au Génie » : voici l’inventaire précis que dresse Mathias Enard des réalisations de Michel-Ange, le peintre, l’architecte, le sculpteur de la Renaissance – s’il fallait encore le présenter.

Car Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants traite bien de Michel-Ange, de son supposé séjour à Constantinople, en 1506, alors qu’il fuit le pape Jules II pour lequel il dessinait le plan d’un tombeau – le tout, sans avoir touché un sou. Las, le célèbre sculpteur de David répond à la proposition du sultan Bajazet de venir construire un pont qui enjamberait la Corne d’Or. Mais ce n’est pas pour découvrir les rives du Bosphore que l’artiste s’engage : flatté de passer après Leonard de Vinci, dont le projet fut refusé, c’est l’appât du gain et de la célébrité mondiale qui le jette dans le dédale des rues de Constantinople.

Mathias Enard dresse le portrait d’un homme vaniteux, orgueilleux, colérique, névrosé, solitaire, manquant cruellement d’assurance : « c’est peut-être dans la frustration qu’on peut trouver l’énergie de son art » nous dit-il. Il préfère gratter la couche de vernis surplombant la légende pour mettre le doigt sur l’humanité de l’artiste plutôt que de combler d’éloges un être supposé supérieur. Ses problèmes d’argent, ses sautes d’humeur, ses angoisses, sa peur maladive du complot, ses pannes d’inspiration, sa propre condition d’homme sont autant de palettes avec lesquelles Mathias Enard compose des chapitres, qui constituent autant de voies de passage entre l’homme et l’artiste. Tout le projet d’Enard tient peut-être dans cette phrase: « le sculpteur sans égal, futur peintre de génie et immense architecte n’est plus qu’un corps, tordu par la peur et la nausée ». Michel-Ange dans sa condition humaine, avant tout.

Enard nous confirme, à la fin de Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants (mais on l’avait quand même bien deviné) que le roman n’est pas précisément un récit historique. Il s’est pourtant appuyé autant qu’il le pouvait sur des vérités : ainsi, il traduit des lettres, reproduit des dessins, s’appuie sur la biographie de Michel-Ange par Ascanio Condivi, mais c’est ainsi, « pour le reste, on n’en sait rien ». A partir de là, Mathias Enard peut nous emmener là où bon lui semble, la fiction peut s’emparer des faits dans les règles de l’art.

Alors, l’auteur livre Michel-Ange aux assauts de l’amour, qui le laissent de marbre. Les affres du désir. Avec une écriture et un style sensuels, Mathias Enard donne vie à un être androgyne, à un poète transi d’amour pour le sculpteur, qui sont l’occasion de multiplier les points de vue, de raconter d’autres histoires, à propos de batailles, de rois et d’éléphants, qui comptent parmi les passages les plus lyriques du livre, les plus jouissifs, de ceux qui laisseront un souvenir impérissable: « Je sais que les hommes sont des enfants qui chassent leur désespoir par la colère, leur peur dans l’amour ; au vide, ils répondent en construisant des châteaux et des temples. Ils s’accrochent à des récits, ils les poussent devant eux comme des étendards ; chacun fait sienne une histoire pour se rattacher à la foule qui la partage ».

Même les descriptions de cette ville aux saveurs colorées qu’est Constantinople sont emplies de lyrisme, d’une force poétique : « la Corne d’Or se perd dans des méandres de brume obscure, et, à l’est, le Bosphore dessine une barrière grise dominée par les épaules sombres de Sainte-Sophie, gardienne du fossé qui les sépare de l’Asie ».

Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants interroge les limites de l’artiste face à son œuvre, le processus de création, et en profite pour revisiter un mythe. Assurément, un roman de la rentrée à ne pas manquer. Puisse Mathias Enard nous parler encore longtemps d’autres batailles, d’autres rois et d’autres éléphants.

http://www.leglobelecteur.fr/index.php?post/2010/08/27/Mathias-Enard-Parle-leur-de-batailles%2C-de-rois-et-d-%C3%A9l%C3%A9phants

C'est la version raccourcie d'un article critique écrit par Vincent Jolit

13 mai 1506. Laissant derrière lui Jules II, pape guerrier, orgueilleux et mauvais payeur, ainsi que l'oeuvre qu'il a entamé pour ce dernier à Rome, Michelangelo Buonarroti débarque à Constantinople invité par Bajazet le Juste. Le sultan propose au sculteur de génie une somme faramineuse pour qu'il lui dessine un pont reliant les deux rives du Bosphore. Monumental et enrichissant projet que Michel Ange accepte afin de fuir l'Italie et ses tracas, mais aussi par défi: avant lui, le dessin de Léonard de Vinci a été refusé par le sultan...

Au-delà du plaisir que le lecteur, amateur d'art ou non, peut ressentir à la découverte des aventures stambouliotes de Michel-Ange, Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants interpelle le mythe, l'imaginaire et le fantasme orientaliste à la manière du Salammbô de Flaubert. Le voyage, les riches et équilibrées descriptions, le caravansérail, les danses androgynes, tout concourt au ravissement des sens. Et le trouble que Michel-Ange ressent face à ces beautés, proche, par procuration, de celui qui gagne le lecteur, semble être le miroir du plaisir que fut l'écriture de ce texte par son auteur. En cela, le roman de Mathias Ennard est déjà une réussite.

Mais, outre les indications apportées, ou en tout cas suggérées, en matière d'Histoire de l'Art (telle l'éxecution qui influença Michel-Ange pour sa scène de David et Goliath ; telle ornementation que l'on retrouvera "dans un recoin de la chapelle Sixtine quelques années plus tard"), Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants est un livre aux multiples lectures, un roman à plusieurs visages. Le lecteur est dans un premier temps frappé par le jeu des oppositions qui s'y dévloppe. Des oppositions qui tiraillent Michel-Ange dans ses choix: pape/sultan, chrétien/musulman, orient/occident, homosexualité/hétérosexualité... De fait, l'édification de ce pont apparaît dans le récit comme la métaphorique solution pouvant atténuer les frictions qui hantent le sculpteur, tandis qu'elle semble être chez l'auteur un utopique désir de lier deux mondes antinomiques.

Voici une critique du site Canal Street (Canal+)

Florence 1506 : Michelangelo Buonarroti n'est pas encore le grand Michel-Ange. Il n'a pas peint le plafond de la chapelle Sixtine, ni terminé le tombeau de Jules II. D'ailleurs il ne veut pas. Pourquoi continuer s'il n'est pas payé ? Son nom commence à se faire connaître en Europe, il a créé l'imposant David, sculpture parfaite de la Renaissance italienne.
Alors quand le Sultan Bayazid l'invite à construire un pont sur la Corne d'Or, comment peut-il décliner cette offre suprême ? Ainsi s'ouvre un chapitre de la vie de Michel-Ange qui se déroule dans une Constantinople magique et majestueuse.

C’est avec une écriture simple, dans un style esthétique et poétique, impeccablement subtil, que Mathias Enard nous fait découvrir l’âme de Constantinople et Michel-Ange, pas seulement le créateur d’un Art inédit mais aussi l’homme dans tout son être.
Les odeurs des épices, la douceur des tissus, la mélodie du saz ou encore l’air marin du Bosphore effleurent nos sens et nous obsèdent jusqu’à nous troubler. Les marchandises venues de tous parts « …huile de Mytilène, savons de Tripoli, riz d'Égypte, mélasse de Crète, tissus d’Italie, charbon d’Izmit » sont une séduisante invitation au voyage.


http://canalstreet.canalplus.fr/actu/da-vinci-blog/parle-leur-de-batailles-de-rois-et-d-elephants-le-dernier-prix-goncourt-des-lyceens